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Scratch endométrial : scam douloureux ou solution miracle pour la fertilité ?

Photographie par Ruby Woodhouse.
Il est difficile d'imaginer ce que l'on peut ressentir lorsque la muqueuse de son utérus est blessée intentionnellement. Mais de nombreuses femmes qui peuplent les communautés #TTC (trying to conceive) sur Instagram en ont fait l'expérience. Certaines disent que cela fait un "mal de chien" et que c'est "les 5 secondes les plus douloureuses que j'ai jamais ressenties (jusqu'à présent)". Une femme, qui dit avoir normalement un seuil de douleur élevé, a écrit : "Ça m'a fait glapir et même verser une larme."
Ce processus douloureux, connu sous le nom de scratch endométrial, est une forme de traitement de la fertilité - un soi-disant complément pour aider à étayer le succès de la FIV. Mais les preuves de l'efficacité de cette pratique sont incertaines et les raisons de son utilisation sont complexes.
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Le scratch endométrial décrit un processus qui est généralement effectué avant une FIV. La procédure consiste à gratter l'endomètre (la paroi de l'utérus) à l'aide d'un petit outil stérile.
Le Dr Raj Mathur, président de la British Fertility Society et porte-parole du Royal College of Obstetricians and Gynaecologists (RCOG), explique : "L'objectif est d'augmenter les chances que l'embryon s'implante avec succès dans la paroi utérine, permettant ainsi à la femme de tomber enceinte. La théorie veut que le scratch libère des substances chimiques et des hormones qui rendent l'endomètre plus réceptif à l'implantation de l'embryon".
Les recherches menées ces dernières années pour savoir si le scratch endométrial favorise la fertilité sont toutefois contradictoires, selon Sarah Lensen, chercheuse en subfertilité et spécialiste des essais cliniques à l'Université de Melbourne.
"Si l'on ne considère que les essais contrôlés randomisés (généralement considérés comme les études de la plus haute qualité), certains essais font état d'un bénéfice de la procédure et d'autres ne signalent aucun effet, voire une réduction des chances de conception", explique-t-elle à R29. Sarah précise toutefois que beaucoup de ces études présentent des limites très importantes qui rendent leurs résultats peu fiables. C'est ce que reflète le feu orange attribué au scratch endométrial par la Human Fertilisation and Embryology Authority (HFEA) - signe que les preuves des avantages d'un complément de fertilité sont limitées.
L'intervention comporte des risques supplémentaires (aussi minimes soient-ils), notamment de légers saignements vaginaux et un faible risque d'infection. Et bien sûr, il y a la douleur de la procédure elle-même. Ainsi, d'après Sarah : "Il n'y a pas de preuve solide que le scratching endométrial puisse aider les femmes à avoir un bébé par FIV".
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Dans une déclaration à Refinery29, la British Fertility Society, le RCOG et le Fertility Network UK font écho à ce sentiment - avec des réserves.
Gwenda Burns, directrice générale de Fertility Network UK, déclare : "Nous conseillons à toute personne qui envisage de payer pour des tests ou des traitements supplémentaires de vérifier les informations données par l'organisme de réglementation de la fertilité, la Human Fertilisation and Embryology Authority (HFEA), afin de l'aider à prendre une décision éclairée."
De même, le RCOG et la British Fertility Society déclarent ne pas être favorables à ce que le scratch endométrial soit systématiquement proposé aux personnes et aux couples qui subissent une FIV, car "les preuves actuelles sont contradictoires et, bien qu'il ne s'agisse pas d'une procédure nocive, elle est intrusive et peut être douloureuse."
Et d’ajouter : "Toute personne qui envisage le scratch endométrial comme un complément de fertilité doit être pleinement consciente des preuves contradictoires actuelles, des risques éventuels et du coût, pour lui permettre de prendre une décision éclairée."
Natalie, 26 ans, a subi un scratch endométrial avant son premier transfert d'embryon en octobre 2021, après avoir été diagnostiquée avec une infertilité inexpliquée en août. "Ils m'ont dit que cela me donnerait plus de chances que l'embryon s'implante", raconte-t-elle à R29, le décrivant comme "assez inconfortable mais supportable, comme un frottis". Si son premier cycle de FIV n'a pas été concluant, elle estime que la procédure a été bénéfique "parce qu'à l'époque, je pensais que cela nous donnerait la meilleure chance". Elle entame maintenant un deuxième cycle de FIV dans une autre clinique.
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Marie, 39 ans, a subi un scratch endométrial en 2016, à une époque où l'on connaissait moins l'efficacité de cette procédure, avant une série de FIV infructueuse en 2017.
"On m'a conseillé de faire un scratching en 2016. Rétrospectivement, ce n'était pas le bon conseil pour moi et cela m'a causé une grande douleur, du stress et un traumatisme parce qu'à l'époque, j'avais de multiples problèmes gynécologiques qui n'étaient pas entièrement maîtrisés."
Il y a des cas de réussite et des moments où le traitement est encore proposé. Julija Gorodeckaja, directrice médicale de groupe adjointe chez Care Fertility au Royaume-Uni, explique à R29 que si le scratch endométrial "n'aide probablement pas toutes les femmes, il a sa place sur le marché".
Care Fertility propose désormais le scratch endométrial à deux groupes de patient·es. Le premier groupe est composé de patient·es qui ont déjà eu un cycle de FIV réussi avec un scratch et qui viennent pour leur deuxième bébé, et qui pensent que cette procédure a contribué à leur succès. Selon le Dr Julija, il est préférable, tant pour le patient que pour le médecin, de suivre à nouveau le même plan de traitement si le cycle de traitement a été concluant. "Si vous suivez le même traitement qui a été couronné de succès dans le passé et qu'il ne l'est plus aujourd'hui, cela est généralement accepté plus favorablement car nous savons que les traitements de fertilité ne fonctionnent pas à 100 %." En d'autres termes, si vous changez quelque chose et que le traitement ne fonctionne pas, vous attribuerez probablement le manque de succès à ce que vous avez changé, et non à la malchance, à la physiologie ou au fait que le traitement de la fertilité ne fonctionne pas toujours. Le deuxième groupe, selon Julija, est celui des patients en FIV qui devraient théoriquement être capables de concevoir (soit parce qu'ils sont jeunes, soit parce qu'ils ont des embryons de bonne qualité, provenant de leurs ovules ou d'un don d'ovules) mais qui ne le font pas, pour une raison ou une autre.
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Selon les recherches sur lesquelles Sarah a travaillé et qui ont été publiées en décembre 2021, le bénéfice le plus courant du scratch endométrial rapporté par les cliniciens n'était pas nécessairement une grossesse réussie. "Le principal avantage rapporté était que, pour les patientes qui demandent fortement le scratch endométrial, le fait de le leur proposer réduit leur détresse psychologique". Un tiers des cliniciens ont également déclaré que cela donnait de l'espoir aux femmes et les motivait à poursuivre la FIV. En revanche, seuls 8 % d'entre eux pensent que cela améliore la probabilité de grossesse." Cet aspect psychologique est sans doute en jeu lorsque le grattage de l'endomètre est répété pour la deuxième fois après une grossesse réussie, car l'avantage du grattage est tout autant lié au fait de ne pas ajouter de variables qui pourraient conduire à plus de détresse. 
Bien que Julija et Sarah expliquent à R29 que le scratch endométrial est généralement proposé aux patientes après plusieurs échecs avec la FIV standard, ce n'est pas toujours le cas. Les choses se compliquent lorsque les patient·es, qui sont de plus en plus informé·es sur le processus, viennent demander des traitements particuliers.
Les patient·es en fertilité sont plus informé·es que jamais sur les traitements et la recherche, grâce à des communautés comme #TTC sur Instagram. Ces connaissances peuvent parfois se heurter à la détresse et au désir de concevoir, les conduisant à poursuivre inutilement des traitements douloureux dans l'espoir qu'ils les aideront à concevoir.
"Nous essayons d'être très transparents pour le patient", explique Julija. "Il est vrai que les patients d'aujourd'hui sont très bien éduqués, ils viennent avec des connaissances très solides et aussi des avis très tranchés sur ce qu'ils veulent et ne veulent pas. Il est parfois difficile de les convaincre de renoncer à des choses dont ils pensent avoir besoin."
Comme le dit Gwenda : "Nous comprenons à quel point il est pénible de ne pas pouvoir avoir d'enfant, et que beaucoup veulent faire tout ce qui peut les aider à concevoir ce bébé tant désiré. Cependant, il est important de connaître les faits avant de prendre une décision."
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