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Se couper les cheveux soi-même : une norme pour beaucoup de femmes noires

Photographed by Refinery29 UK
Depuis le confinement, l'entretien capillaire maison fait désormais partie d'une nouvelle norme collective. Les femmes du monde entier ont appris à couper, teindre et coiffer leurs cheveux à la maison sans l'aide de professionnels. Mais pour de nombreuses femmes qui ont les cheveux afro, s'occuper de ses cheveux à la maison, c'est bien plus que de raccourcir une frange trop longue ou retoucher ses racines. Et ça n'a rien de nouveau.
Qu'ils soient naturels ou défrisés chimiquement, nos cheveux ont besoin de soins bien particuliers. C'est pourquoi l'approche DIY s'est imposé pour pouvoir se débrouiller de manière autonome. Pour toute une série de raisons pratiques et financières, le fait de pouvoir se coiffer soi-même nous facilite la vie. Alors que le monde comptait les jours avant la réouverture des salons de coiffure, pour beaucoup de femmes noires comme moi, leur fermeture n'a fait aucune différence sur la manière dont on entretient nos cheveux.
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"Alors que le monde comptait les jours avant la réouverture des salons de coiffure, pour beaucoup de femmes noires comme moi, leur fermeture n'a fait aucune différence sur la manière dont on entretient nos cheveux."

En réalité, le manque de disponibilité de soins adaptés a longtemps été un obstacle pour de nombreuses femmes noires vivant dans des zones à prédominance blanche, car les commerces traditionnels ne répondent pas à nos besoins en matière de soins capillaires. Pour des femmes comme Lynda Moyo du podcast "Mane of Your Own", apprendre à se coiffer soi-même n'était pas un choix, mais plutôt une nécessité. Dans les années 80, la diversité ethnique était limitée dans la ville de Preston. C'est à la maison qu'on apprenait à s'occuper de nos cheveux, tout comme d'autres compétences de la vie courante, comme la cuisine. De même, ma mère raconte que lorsque nous sommes arrivés en Grande-Bretagne à la fin des années 90, elle a dû s'appuyer sur les connaissances et la bienveillance d'inconnus pour s'occuper de ses cheveux et de ceux de ses deux petites filles. C'est quelque chose dont elle n'avait jamais fait l'expérience en Ouganda, notre pays d'origine.
Même histoire pour son amie Denise*, qui est arrivée en Grande-Bretagne en provenance du Cameroun en 2002. Elle dit qu'elle a été forcée d'apprendre à s'occuper de ses cheveux comme personne d'autre ne pouvaient - ou ne voulaient - le faire. Elle se souvient avoir immédiatement défait les tresses qu'elle venait de faire faire chez un coiffeur, car elles tombaient systématiquement quelques heures plus tard. Iris*, qui a quitté le Zimbabwe pour le Pays de Galles en 2000, se souvient qu'elle a rapidement compris qu'elle ne pouvait pas compter sur les salons de coiffure pour se faire coiffer. En plus de ça, il n'y avait aucun produit adapté à son type de cheveux dans les commerces.
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Le manque décourageant, mais à peine surprenant, de choix en matière de soins capillaires pour les Noir·es n'est pas du tout révolu. On continue d'entendre ces mêmes témoignages encore aujourd'hui, et je peux moi aussi en attester. En cherchant des salons de coiffure afro, je me suis souvent retrouvée à demander conseil à des gens que je ne connaissais pas, tout comme ma mère l'avait fait 20 ans auparavant.

"Je voudrais que plus de femmes noires aient le choix d'aller chez le coiffeur, au même titre que toutes les femmes blanches aux cheveux raides. Le salon de coiffure doit être un lieu qui répond à nos besoins et à ceux de tou·tes les autres"

Dans certaines régions, la situation est légèrement moins désespérante. On peut parfois trouver dans les drugstores des centres-villes une gamme limitée de produits capillaires destinés aux cheveux afro. Mais c'est surtout à Internet qu'on doit des générations de gourous autoproclamés du style afro. Il existe un grand nombre de tutoriels sur YouTube, des sites web et des comptes sur les réseaux sociaux où des femmes noires s'adressent directement à d'autres femmes noires, les aidant à traverser ce parcours du combattant.
Mais ce n'est pas suffisant. Les soins capillaires afro sont toujours en marge du courant dominant et de nombreux nouveaux produits DIY apparus pendant le confinement en témoignent : teinture pour cheveux sous la douche, mieux adaptée aux cheveux raides et blonds ; brosses soufflantes... Ces produits sont conçus, comme la majorité des choses dans ce monde, pour un·e consommat·eur·ice blanc·he.
L'industrie de la coiffure et de la beauté se doit maintenant de changer. Ça ne suffit pas que davantage de produits capillaires afro soient disponibles dans le commerce ou que l'entretien des cheveux afro fasse obligatoirement partie de la formation des coiffeurs - ce pour quoi il existe maintenant une pétition. Ce qu'il faut, c'est un engagement à long terme pour montrer aux femmes noires que leurs cheveux ne sont pas "différents" ou classés comme "spécialisés". Bien sûr, ça ne se fera pas du jour au lendemain. Mais je ne peux m'empêcher de penser à toutes les façons dont l'avenir des soins capillaires afro pourrait être amélioré. Je voudrais que plus de femmes noires aient le choix d'aller chez le coiffeur, au même titre que toutes les femmes blanches aux cheveux raides. Le salon de coiffure doit être un lieu qui répond à nos besoins et à ceux de tou·tes les autres. On doit se débrouiller toutes seules depuis bien trop longtemps.
*Le nom a été changé.

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